Les exploits des RS en 1973 : La Targa Florio 1973
2ème partie : la Targa Florio 1973
2.2.2 Les difficultés du circuit :
Les routes n'étaient pas larges c'est entendu, l'essentiel du circuit (65km sur 72km) était fait de virages, c'est connu également. Mais il y avait aussi d'autres éléments à considérer.
Chaque année l'Automobile Club de Palerme pressait les autorités locales de réparer les routes incluses dans le périmètre du circuit. Les réparations effectuées étaient assez sommaires et au fils des ans les routes ne se sont pas améliorées. Ces dernières année, la section entre Bivio Polizi et Collesano a été longtemps fermée à la circulation (la route avait été emportée lors d'un glissement de terrain), et celle entre Cerda et Caltavuturo devrait peut être aménagée cet hiver de manière à être accessible à des voitures de sport (dont nos RS). Les réparation étaient effectuées d'urgence durant la semaine d'essais précédant la course, souvent même le samedi précédant la course, réservant ainsi quelques surprises aux pilotes pour le dimanche matin lors du premier tour.
A part le mauvais état du revêtement le tracé présentait de nombreuses bosses et autres surprises d'une route de montagne.
Les pilotes devaient passer entre 6 et 7 heures dans un espace confiné, dédié entièrement à la fonctionnalité de la voiture peu au confort et à la sécurité du pilote. Certaines concessions étaient toutefois parfois faites pour amener de l'air frais au pilote, qui après tout en avait autant besoin que son moteur (vois ci dessous le poste de pilotage d'une 907 en 1968). Quant à la sécurité elle était ce quelle était à l'époque : harnais, extincteur étaient des concepts qui restaient à mettre en œuvre. Dans un interview récent Gijs Van Lennep raconte que dans le poste de pilotage "il faisait parfois plus de 50°C, et nous n'avions pas d'eau. Après deux heures après trois tours de courses et 4500 passages de rapports, on brûlait littéralement".
Noter bien l'arrivée d'air et le "poste" d'eau et le bouton "Horn". Nulle part ailleurs un klaxon n'était nécessaire en course !. Car il fallait par moment prévenir la foule répartie le long du circuit qu'une auto arrivait. Celle ci était massée aux endroits stratégiques du circuit (stands, villages traversés) mais aussi le long du circuit :
Pour les spectateurs, et ils étaient de l'ordre d'un demi million, le dimanche de course de la Targa Florio était l'occasion de passer un bon moment à la campagne autour d'un pique nique et quelques bouteilles de vin, tout en regardant passer les bolides. Il arrivait souvent tôt le matin de la course, voire la veille, pour prendre possession des meilleurs "spot".
Les deux photos ci dessous montrent bien l'envahissement du circuit par le public. Les deux couvrent à peu près le même paysage : la première sans le public, la deuxième avec.
Mais il faut aussi le dire, à maintes occasions les spectateurs ont aidé les pilotes à remettre leur auto sur la route après une escapade sur les bas coté.
Il en a été ainsi pour Stirling Moss lors de l'édition de 1955. Il était sorti de la route et des spectateurs l'avaient aidé à remettre sa Mercedes sur la route, ce qui lui a permis de reprendre la course qu'il avait fini par gagner :
En ville, l'accès des spectateurs à la piste et leur protection par des bottes de paille étaient rudimentaires, voire même dérisoires. La photo ci dessous est prise à Collesano après la fameuse épingle à l'entrée du bourg, on y notera la présence des enfants, le photographe qui a son bardat de l'autre coté de la piste, les spectateurs placés devant les barrières, etc...C'était au temps de l'innocence en course :
De même à Campofelice on festoyait au bord du circuit mais cette fois derrière les barrières quand même :
Dans la montagne, il n'était pas facile de doubler les voitures moins rapides et/ou de moindre cylindrée.La photo ci dessous résume bien les problèmes de la circulation lors des essais libres sur route ouverte et de la différence de puissance des autos engagées lors de la course :
Le meilleurs endroit pour doubler était bien sûr la ligne droite de Buonfornello. Certains favoris on été éliminés lors de dépassement aventureux, comme cela été le cas de Bandini à bord d'une Ferrari en 1966, et De Adamich en 1973 sur son Alfa Roméo. Certains pilotes étaient pourtant des experts en la matière : Herbert Müller en 1969 (il était alors sur Lola T70) avait eu une panne d'allumage au départ et il du attendre le départ du dernier concurrent pour pouvoir partir. Lors de son premier tour il a doublé 61 concurrents !
Une autre particularité de cette course était que les stands ne voyaient pas souvent passer leur concurrents : toutes les 40 minutes à peu près. C'est la raison pour laquelle les communications entre les stands et Bivio Polizzi étaient si importantes. Les arrêts y étaient en principe prévus pour changement de pneumatiques et ravitaillement. Mais les mécaniciens devaient être prêts à tout sur un tel circuit. Un pilote pouvait rentrer au stand pour un changement de suspension, de freins, un réglage moteur, ou un simple nettoyage du pare-brise.
Les crevaisons étaient un problèmes récurrents. Une crevaison quelques kilomètres après le départ pouvait impliquer un long trajet avant le retour au stand ou jusqu'à Bivio Polizzi, encore fallait il qu'une roue y soit disponible. Lors des premières éditions de la course les concurrents embarquaient plusieurs pneus de secours. Avec l'amélioration des pneumatiques le nombre des crevaisons a diminué, mais certaines équipes ont du abandonner sur crevaison : Chaparal en 1967, Lola en 1969, Ferrari en 1973. Porsche avait toujours une roue galette disposée à l'avant de la voiture, ce qui par exemple a été bien utile à Vic Elford en 1968.
Enfin consigne était donnée aux pilotes de ne surtout pas quitter leur auto si celle ci était en panne, par peur des chercheurs de souvenirs qui pillaient sans vergogne toute voiture abandonnée. Peter Falk était très clair à ce sujet demandant aux pilotes Porsche de partir avec un peu d'argent liquide pour faire face à quelques éventualités : où ne s'arrête pas l'organisation de nos amis allemands.
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Commentaires:
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c est du lourd!
philippe
Le document est détaillé, intéressant et l'auteur a fait des recherches approfondies.
La Targa Florio illustre l'époque où les pilotes étaient des dieux et où l'automobile faisait rêver.
Votre travail est remarquable: un grand merci.
Jacques Ubags Liège